bordure Dardon

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lundi 13 août 2012

POUVAIT-ON ÉVITER LE MASSACRE ARCHÉOLOGIQUE DU MONT DARDON ?


par le Conseil d’Administration des Amis du Dardon

Quand notre association a été créée en 1965, les membres fondateurs ont choisi de la dénommer « Les Amis du Dardon ». Pourquoi ? D’abord parce que ce sommet granitique, placé au centre de la zone géographique à prospecter, servait ainsi de site fédérateur aux futurs sociétaires. Seconde raison : ils soupçonnaient, avec raison, que ce dernier bastion du Morvan cachait en son sein des trésors archéologiques qui méritaient d’être connus, étudiés et mis en valeur. 

Les fouilles archéologiques qui y ont été menées ont confirmé cette hypothèse : le sommet du Dardon a été habité depuis l’Age du Bronze, puis à l’époque celtique et gallo-romaine ; durant le Haut Moyen Age, il y eut un habitat avec chapelle. Une forteresse close d’une double enceinte de remparts perdura jusqu’au XIVè siècle au moins. Le sommet du Dardon est donc un lieu archéologique connu et reconnu de tous. Mais pas de confusions hâtives ! Si les Amis du Dardon sont sensibles à ce vieux bastion historique, ils ne sont pas pour autant des nostalgiques inconditionnels du passé, écrivant à la plume d’oie à la lueur vacillante d’une chandelle fumeuse. Il y a belle lurette qu’ils ont adopté l’ordinateur à la place de la machine à écrire mécanique et, pour se connecter à internet, ils n’ont de leçons à  recevoir de personne ! Bas débit d’abord, haut débit ensuite quand cela est possible.

Le haut débit donc, parlons-en ! C’est au cours de notre assemblée générale du 11 avril 2010 à Gueugnon que nous avons eu vent de l’implantation d’un relais internet au sommet du Dardon, grâce à notre sociétaire toulonnais Pierre Law. On sut alors que c’était le Conseil Régional de Bourgogne qui était à l’initiative de ce projet ; y a-t-il eu débat au sein des conseils municipaux des communes intéressées ? L’enquête de commodo et incommodo a pourtant eu lieu mais  dans la plus grande discrétion afin d’éviter les indiscrétions … et la contradiction des gens trop curieux.

Curieux, les Amis du Dardon l’auraient certainement été … s’ils avaient été avertis à temps. Quand la nouvelle arriva, c’était trop tard. Le mal était fait, c’est-à-dire le pylône dressé et la conduite électrique enterrée, « détruisant sur plusieurs dizaines de mètres les zones les plus sensibles du site, c’est-à-dire à l’intérieur même du rempart de l’oppidum, en massacrant au passage les niveaux archéologiques » (1). Que pouvait alors faire notre association ? rien, sinon avertir le Comité Départemental de la Recherche Archéologique (CDRA) dont le Président est Jean-Claude Notet. Et celui-ci se démena comme un beau diable, sonnant à la porte de la DRAC (Direction régionale des Affaires Culturelles) et déposant plainte auprès du Procureur de la République. Celui-ci eut la politesse de répondre par écrit : « … en l’absence de toute infraction pénale, aucune suite judiciaire pénale ne peut être envisagée » (lettre du 18 janvier 2011). Quid de la notoriété publique du site du mont Dardon s’il n’y a plus rien ? 

 Entre temps (7 juillet 2010), les Amis du Dardon (M. Damiron, M. Law, M. Dauvergne et Mme Crumley) avaient eu une réunion d’information à Uxeau avec le maire de la commune, deux adjoints et le représentant de Net-Bourgogne. C’est ainsi que l’on apprit que c’était le Conseil Régional qui avait délégué ses pouvoirs à la société commerciale Net-Bourgogne pour installer le maillage des départements de Côte d’Or, Yonne et Saône-et-Loire, travaux payés par les contribuables. L’alimentation électrique a été réalisée par le SYDEL. Y a-t-il eu cahier des charges ? des plans d’installation ? on ne sait pas. En revanche, comme les déblais de la tranchée ont été immédiatement mis en décharge dans une lagune, rien n’est exploitable. Le mal est donc fait.

 Depuis ces faits, le CDRA a demandé que la zone du mont Dardon soit administrativement protégée. A l’heure actuelle, rien en vue : les différents services chargés de la protection du patrimoine « se renvoient la balle », mais les Amis du Dardon sauront être attentifs pour que ce dossier déposé se finalise afin d’éviter tout nouveau massacre. 

 Ironie de l’histoire. Ce pylône a été mis en place pour une technologie déjà dépassée. Des particuliers ont choisi l’accès internet par satellite. Et nous apprenons qu’Orange est en train d’installer le haut débit sur la commune d’Uxeau par le système de la fibre optique (conseil municipal d’Uxeau, journal du 3 décembre 2011). On aura donc saccagé le Dardon pour rien. Notre association n’est pas opposée aux nouvelles technologies, mais aimerait qu’il y ait plus de transparence et de concertation concernant les futurs projets touchant indirectement l’archéologie et notre patrimoine culturel. 

 Nos sociétaires et lecteurs voudront bien excuser les administrateurs des Amis du Dardon de ce long laïus. Il leur a semblé que tous ont le droit d’être informés, comme devrait l’être naturellement tout citoyen de notre pays. L’antenne du mont Dardon a donc bien été installée en toute légalité. Ce qui amène immédiatement la question suivante : ce qui est légal est-il moral ? Beau sujet de philosophie à débattre, n’est-ce-pas ? 

 (1). NOTET (Jean-Claude), Un massacre archéologique au Mont Dardon. Bulletin de la Physiophile, Montceau-les-Mines, n° 154, juin 2011.
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