bordure Dardon

bordure Dardon

lundi 8 octobre 2012

LE NOM DU NOUVEAU COLLÈGE


Il y a quelques mois, nous avions déjà posé la question alors que l’établissement n’en était qu’au début de sa construction. Allait-on faire un choix culturel (écrivain local célèbre par exemple) ou politique ? La réponse est maintenant arrivée : le choix est politique.

Certains professeurs de français, sans doute naïfs, pensaient qu’on allait lui donner le nom d’un écrivain local célèbre, Gabriel Chevallier en l’occurrence . Que nenni !!!! Le nom, choisi par le Conseil Général (qui ? comment ? pourquoi ?) et entériné par le conseil d’administration du collège, est « Collège Jorge Semprun ». Vous ne savez pas qui est ce personnage ? allez sur internet pour consulter Wikipédia. Vous saurez tout : Jorge Semprun est un écrivain et homme politique espagnol (1923-2011). Ce choix prête à réfléchir et mérite qu’on s’y attarde un instant.

Résumons sa biographie :
Naissance 10 décembre 1923 à Madrid (Espagne)
Jorge Semprún est issu d'une famille de la grande bourgeoisie espagnole. Sa mère, Susana Maura (décédée en 1932) est la fille de l'homme politique libéral des années 1880-1925, Antonio Maura, président du gouvernement espagnol, et la sœur de Miguel Maura, ministre et républicain modéré. Son père, José María Semprún (1893-1966), catholique et républicain, avocat et professeur de droit, a occupé pendant la deuxième république, des fonctions de gouverneur civil de province (Tolède, Santander).
Période de la guerre d'Espagne
Pendant le déclenchement de la Guerre d'Espagne, en juillet 1936, la famille se trouve en vacances à Lekeitio, près de Bilbao ; elle gagne Bayonne en bateau, séjourne d'abord à Lestelle-Betharram (Pyrénées-Atlantiques) dans la maison de Jean-Marie Soutou, un proche d'Esprit, revue dont José María Semprún était correspondant en Espagne, puis dans la région de Genève où il se voit offrir un poste diplomatique : du début de 1937 à février 1939, il représente la République espagnole aux Pays-Bas. Jorge et ses six frères et sœurs passent donc deux ans dans ce pays ; Jorge est scolarisé dans un lycée local et maîtrise, à cette époque, le néerlandais.
Exil en France
Après la fermeture de la légation républicaine à La Haye, la famille s'exile en France ; Jorge termine ses études secondaires au lycée Henri-IV, à Paris ; il participe à la manifestation patriotique du 11 novembre 1940 ; en 1941, il obtient le 2e prix de philosophie au Concours général et est reçu au baccalauréat, puis commence des études de philosophie à la Sorbonne.
Résistance
Il rejoint alors la Résistance : il entre en contact avec le réseau communiste des Francs-tireurs et partisans (FTP) ; il est accepté seulement dans les MOI (Main-d'œuvre ouvrière immigrée). Il entre alors au Parti communiste d'Espagne (PCE) en 1942. Mais il intègre, avec l'accord de la MOI, le réseau Jean-Marie Action, qui relève de l'organisation Buckmaster, c'est-à-dire la les services secrets britanniques (SOE). Ainsi, le PC sera au courant de ce qui s’organise à Londres. Jorge Semprun est intégré au réseau dirigé par Henri Frager qui opère en Bourgogne (réception de parachutages d'armes et répartition de ces armes dans les maquis de l'Yonne et de la Côte-d'Or).
Déportation
En septembre 1943, Jorge Semprún est arrêté par la Gestapo à Joigny et, après un séjour à la prison d'Auxerre, déporté au camp de concentration de Buchenwald. Après la période de quarantaine dans le Petit Camp, il est affecté par l'organisation communiste clandestine du camp à l'Arbeitsstatistik (l'administration du travail). Dans cette organisation, il a pour supérieurs de futurs cadres des démocraties populaires : Josef Frank, Ladislav Holdos, Ernst Busse, Walter Bartel, Willi Seifert (kapo de l' Arbeitsstatistik). Pour le compte du PCE, dont le leader dans le camp est Jaime Nieto (dit « Bolados »), il est chargé d'organiser des activités culturelles pour les déportés espagnols. Par ailleurs, il a l'occasion (pendant la demi-journée de repos du dimanche après-midi) de fréquenter le sociologue Maurice Halbwachs ainsi que le sinologue Henri Maspero, eux aussi détenus à Buchenwald, jusqu'à ce qu'ils y meurent. Peu avant l'arrivée des troupes américaines du général Patton, il participe au soulèvement des déportés. Le camp est libéré le 11 avril 1945 ; Jorge Semprún est évacué le 26 et est de retour à Paris à la fin du mois.
Retour à la vie civile
Le retour à la vie civile va être très difficile, avec notamment sa chute de train à l'arrivée en gare de Saint-Prix (où habite son père) en août 1945. Il commence ensuite à mettre par écrit ses souvenirs de Buchenwald mais, séjournant dans le canton suisse du Tessin avec la famille de sa sœur Maribel (d'octobre 1945 à janvier 1946), il se rend compte que la poursuite de ce travail le met en danger. Il prend alors la décision non seulement d'y mettre fin, mais encore de ne plus repenser à ce qui s'est passé durant ces années (il parle d'« amnésie volontaire»).
En 1947, il a un fils, Jaime, avec la comédienne Loleh Bellon. Jaime Semprun est décédé en août 2010.
Parti communiste d'Espagne
Il reste un membre actif du PCE. Pendant quelques années, il milite tout en travaillant, principalement comme traducteur à l'UNESCO. En 1952, il devient permanent du parti affecté au travail clandestin en Espagne. De 1953 à 1962, il coordonne la résistance communiste au régime de Franco, faisant plusieurs longs séjours en Espagne sous différents pseudonymes, notamment celui de Federico Sánchez. Il est plus particulièrement chargé des relations avec les milieux intellectuels. Il entre au Comité central du PCE en 1954 puis au Comité exécutif (Bureau politique) en 1956. Il effectue aussi plusieurs missions dans les pays de l'Est, en particulier auprès de Dolores Ibárruri, Secrétaire général du parti : en janvier 1956, à Bucarest; et de nouveau en 1959, à Ouspenskoie (URSS), avec Santiago Carrillo : c'est à ce moment que Dolores Ibárruri annonce à ses visiteurs sa démission du poste de Secrétaire général.
En 1962, Santiago Carrillo, devenu Secrétaire général, décide de le retirer du travail clandestin en Espagne. Il est exclu du parti en 1964, en même temps que Fernando Claudín. La raison invoquée est : « divergence de point de vue par rapport à la ligne du Parti ». À partir de ce moment, il se consacre principalement à l'écriture.
Action politique après 1964
En 1966, il demande aux autorités espagnoles un passeport officiel, qui lui est accordé, bien qu'avec réticence, compte tenu de son passé. Il peut ainsi circuler librement entre l'Espagne et la France où il continue de résider. En 1969, Jorge Semprún participe à la création des éditions Champ Libre aux côtés de Gérard Lebovici.
Déjà bien actif durant son exil forcé, l’écrivain le fut bien sûr plus encore lors de la mort de Franco en 1975, et l’arrivée sur le trône d’une monarchie parlementaire. Il fut même, de 1988 à 1991, le ministre de la Culture de Felipe Gonzales. En février 1981, il apporta son soutien au roi Juan Carlos, qui sut rester ferme après avoir essuyé une tentative de coup d’Etat.
Dans cette fonction, il se trouve très vite en conflit larvé avec Alfonso Guerra, le leader en second du PSOE, le Parti socialiste ouvrier espagnol ; en 1991, il est amené à quitter le gouvernement, Felipe González ayant décidé de couvrir des pratiques discutables d'Alfonso Guerra.
Dernier combat : l’Europe.
Après l’utopie communiste, l’utopie européenne. La « figure européenne », faite de diversités des langues et de l’unité démocratique, fut le dernier cheval de bataille cher à l’écrivain et homme politique. « Une tombe au creux des nuages. Essais sur l’Europe d’hier et d’aujourd’hui » est le titre du dernier livre que fit paraître Semprun, en 2010.
- Décès 7 juin 2011 (à 87 ans) à Paris (France).
Œuvres et distinctions
Il a écrit des romans, des récits autobiographiques, des pièces de théâtre et des scénarios, pour lesquels il a reçu plusieurs récompenses. Un thème récurrent de son œuvre est la dénonciation de l'horreur de la guerre, et notamment des camps de concentration.
En 1969, il reçoit le Prix Femina pour La Deuxième Mort de Ramón Mercader. En 1994, il reçoit le Prix de la paix des éditeurs et libraires allemands.
Le Prix de la Paix des Editeurs et Libraires allemands., le Prix Fémina Vacaresco 1994 et le Prix littéraire des droits de l'Homme 1995 lui ont été décernés pour L'écriture ou la vie ; il a également reçu le prix de la ville de Weimar en 1995 et le prix Nonino (Italie) en 1999.
En 1996, il est élu à l'Académie Goncourt ; il n'a pas pu entrer à l'Académie française car il a conservé la nationalité espagnole. En 2004, il a reçu le Prix Ulysse pour l'ensemble de son œuvre. Le 30 novembre 2007, il a reçu les insignes de docteur honoris causa de l'Université Rennes 2 Haute Bretagne.

Bibliographie
* 1963 : Le Grand Voyage - Prix Formentor
* 1967 : L'Évanouissement
* 1969 : La Deuxième Mort de Ramón Mercader - Prix Femina
* 1976 : Autobiografía de Federico Sánchez (Autobiographie de Federico Sánchez) - Prix Planeta 1977
* 1980 : Quel beau dimanche !
* 1981 : L'Algarabie
* 1983 : Montand la vie continue, Éditions Denoël
* 1986 : La Montagne blanche
* 1987 : Netchaïev est de retour
* 1993 : Federico Sánchez vous salue bien
* 1994 : L'Écriture ou la Vie - Prix Femina Vacaresco
* 1995 : Mal et modernité
* 1995 : Se taire est impossible, avec Elie Wiesel
* 1998 : Adieu, vive clarté…
* 1998 : Le Retour de Carola Neher et le Manteau d'Arlequin
* 2001 : Le mort qu'il faut - Prix des Charmettes/J.-J. Rousseau 2001
* 2002 : Les sandales, Éditions Mercure de France, (ISBN 2715223676)
* 2003 : Veinte años y un día (Vingt ans et un jour)
* 2003 : el pais semanal
* 2005 : L'Homme européen, avec Dominique de Villepin, Collection Tempus, Éditions Perrin, 2006, Paris, (ISBN 2-262-02395-6)
* 2008 : Où va la gauche ?, Éditions Flammarion
* 2010 : Une tombe au creux des nuages. Essais sur l'Europe d'hier et d'aujourd'hui, Collection Climats, Éditions Flammarion ( Voir analyse par Bertrand Le Gendre, Le Monde, 18 mars 2010 ).

Autres ouvrages
* Une morale de résistance : Husseri, Bloch, Orwell, Jorge Semprun, Bibliothèque Nationale de France, 10/2002
* Grandeur et modestie de l'engagement, Jorge Semprun, Éditions Descartes et Cie, 11/2005
* De l'exil à l'oubli : Camps de réfugiés espagnols en France (1936-1939), Jorge Semprun, Éditions Hugo et Compagnie, 02/2006
* Picasso : L'homme aux mille masques, Jorge Semprun, Maria Teresa Ocaña, Jean-Paul Barbier-Mueller, Pierre Daix, Éditions Somogy, 05/2006
* Espagnol : Collège / Lycée, Jorge Semprun, Annie Bertrand, Malika Cessac, Andrée Paul, Éditions De La Cite, 08/2004
* Chroniques d'ailleurs, Paul Steinberg, Jorge Semprun, Éditions Ramsay, 01/2007


Filmographie
Scénariste, sauf mention particulière
* 1966 : Objectif 500 millions de Pierre Schoendoerffer
* 1966 : La Guerre est finie d'Alain Resnais
* 1969 : Z de Costa-Gavras
* 1970 : L'Aveu de Costa-Gavras
* 1972 : L'Attentat d'Yves Boisset
* 1974 : Les Deux mémoires : réalisation et scénario[20]
* 1974 : Stavisky d'Alain Resnais
* 1975 : Section spéciale de Costa-Gavras
* 1976 : Une femme à sa fenêtre de Pierre Granier-Deferre
* 1978 : Les Routes du sud de Joseph Losey
* 1986 : Les Trottoirs de Saturne de Hugo Santiago
* 1991 : Netchaïev est de retour de Jacques Deray : adaptation de son roman par Dan Franck et Jacques Deray
* 1995 : L'Affaire Dreyfus d'Yves Boisset (TV)
* 1997 : K d'Alexandre Arcady
* 2010 : Ah, c'était ça la vie ! de Franck Apprederis (TV)

QUESTION :
Pourquoi a-t-on donné le nom de « Jorge Semprun » au nouveau collège de Gueugnon ? a-t-on voulu honorer l’écrivain ? ou le communiste espagnol ? Quel rapport cet homme remarquable a-t-il avec Gueugnon ? avec le Charolais ? avec la Bourgogne ? aucun, à notre connaissance…

 ****************************************************************************




Aucun commentaire: